Schwung ! Non, ce n'est pas la traduction flamande de l'éternuement mais un des plus gros festivals de Classic Rock du Benelux. 8ème édition de ce festival bénéficiant d'une organisation sans faille (et c'est vrai que question festivals, les Belges savent y faire) qui a déjà accueilli lors des éditions précédentes des monstres tels que Motörhead, Deep Purple, Scorpions, Thin Lizzy entre autres. Près de douze heures de concerts prévues, le marathon pouvait commencer.

Les premiers à s'y coller sont les Calaisiens de Zoé. C'est la première fois que le Schwung accueille un groupe français. Je les connais pour les avoir déjà croisés en première partie des Datsuns. Si vous aimez le Stoner Rock, Motorhead et les guitares plombées, Zoé est pour vous, tout à fait dans cet esprit, s'autorisant "Blitzkrieg Bop" des Ramones et "Nice Boys" de Rose Tattoo en guise de reprises. Ces quatre-là n'ont pas usurpé leur place en ouverture du festival, leur gros rock suscitant l'engouement du public présent.

Le rouleau-compresseur Zoé passé, les Belges de Revenge 88 s'emparent de la scène. Un rock assez classique avec au chant un clone de Mick Jagger ou Steven Tyler, tant au niveau du physique que des attitudes. Autant dire que le manque d'originalité ne m'aura pas emballé. Certes c'est joué nickel mais pas trop mon truc, d'autant plus que la faim commençait sérieusement à se faire sentir et qu'il était temps d'aller se "délecter" d'un hamburger dont nos amis d'outre-Quiévrain ont le secret : ça ressemble à tout sauf à de la viande, en est-ce d'ailleurs ?

Plus bandants, les Southern Voodoo. Dans un registre gros rock qui tache, ils assurent le truc. Influences Motörhead ou Nashville Pussy (qui eux-mêmes...), c'est du bon, aidé en cela par un chanteur-guitariste énervé aux yeux habités par les démons du rock. Du gros rock à guitare comme j'aime bien, avec en plus la présence d'une "danseuse légère" apportant un peu de légèreté dans ce monde de brutes.

Avec Thunder arrive le temps des "têtes d'affiche". De ces anglais je ne connaissais que leur reprise du "Gimme Shelter" des Stones, reprise ayant la particularité d'égaler l'original. C'est donc avec une pointe d'impatience que j'attendais de les voir sur scène. Et bien, là, patatras, déception. Le répertoire est composé de morceaux de Hard FM que ne renieraient pas des groupes tels Foreigner. Quant à "Gimme Shelter", ils ne le joueront pas mais proposeront un morceau dont l'intro est calquée sur "Honky Tonk Women" et le refrain sur "It's only Rock'n'Roll" des mêmes Stones. Pourtant impossible de savoir si cela est un clin d'oeil ou non.

Quiconque de normalement constitué ayant été djeunzz durant les années 70 aura certainement joué de la guitare imaginaire devant son miroir en écoutant le Double Live Gonzo de Ted Nugent. Depuis on sait que le personnage a viré ultra-conservateur et réactionnaire pro-Bush. N'empêche qu'on allait pas bouder son plaisir de voir le Nuge sur une scène européenne. Et putain, que ça déménage ; fringué comme un Marines US, posant aux pied du drapeau américain, le militant de la NRA (National Rifle Association, lobby américain qui oeuvre pour la liberté de port d'arme) défouraille dans tous les sens, rebalance tous ses standards, de Cat Scratch Fever à Wang Dang Sweet Poontang à la gueule d'un public ravi de l'aubaine.

Dio, c'est bien sûr le groupe de Ronnie James Dio, qui officia par le passé chez Rainbow et Black Sabbath. On nage là dans un heavy metal à l'anglaise, avec imagerie Donjons et Dragons et tout et tout. En tout cas, pas le genre que j'affectionne, je l'ai d'ailleurs complètement zappé dans ma lointaine jeunesse. Cela dit, malgré les années, force est de constater que la voix de Ronnie James Dio n'a pas bougé ; ça reste quand même un excellent chanteur. Ah, au fait, "Butterfly Ball", vous savez, la grenouille qui chante dans le dessin animé, et bien c'était Ronnie James Dio.

Vous voulez faire balancer la tête d'une douzaine de photographes dans la fosse ? Offrez-leur Status Quo sur scène. C'est ce qui arriva ce samedi. Dès les premières notes de "Caroline", on vit toute la salle - presse et service d'ordre compris - remuer la tête et taper du pied. C'est que le boogie-rock de la bande à Rick Parfitt et Francis Rossi a quelque chose d'irrésistible, même les gamins ne peuvent se retenir de danser. Là aussi, comme dans tout rassemblement "classic-rock", on a droit à un passage en revue des standards, de quoi s'apercevoir que l'alchimie dans le couple Rossi-Parfitt opère toujours aussi bien. Une bonne grosse claque que ce concert, ce soir on a seize ans.

Hormis quelques dates en Allemagne et dans les pays nordiques ainsi que deux passages en Angleterre, le Schwung Festival était l'unique occasion de voir Alice Cooper en Europe. Un événement donc. A près de 60 ans, l'homme est encore en forme. Arrivant sur scène tel un infernal Monsieur Loyal, le rocker de Detroit (tiens, comme Ted Nugent) nous assène ses pires cauchemars. Si avec Status Quo on avait seize ans, là, on en a dix-huit ("I'm eighteen"), tout le decorum de scène est là, kitsch à souhait, de la guillotine au cercueil, en passant par les vieux murs de pierres, tout comme dans les années 70. Etonnamment, en 2006, à l'heure des effets spéciaux numériques high tech, tous ces accessoires de carton-pâte, usés par le temps, ont le charme d'un vieux train-fantôme de fête foraine. En tout cas, pour ce qui est de la musique, rien de doux, tout dans l'excès. Epaulé par son gang de soudards (dont l'ancien batteur de Kiss), le Coop' lui aussi nous gratifiera d'un retour vers nos jeunes années ; "School's Out", "Feed my Frankenstein", "Only Women Bleed" et autres vieilles scies toujours aussi efficaces. Du bon Alice Cooper comme on l'aime.