L'endroit avait connu son heure de gloire il y a déjà pas mal d'années lorsqu'il programmait quelques concerts bien sentis. Aujourd'hui il semblerait que le Rêve d'Herbert, situé en plein coeur de Wazemmes, renaisse de ses cendres après des années de stand-by. A en juger par les concerts programmés en cette rentrée, ça promet d'être chaud. Et ce dimanche soir, d'ailleurs, ça l'a été ; le désormais bien connu plateau Ashtones / Gee Strings prenait possession des lieux pour en faire le nouveau temple punk qui manquait à Lille.

Et du monde, il y en a. Faut dire que là où Ashtones passe, les fûts de bière trépassent, tellement ces Huns du rock drainent de public acquis à leur cause. Première fois que je les vois avec le p'tit nouveau à la guitare, répondant au doux nom d'Ashtone D'Stroy. Ben il assure le bleu, faut dire aussi qu'il a pas mal traîné ses médiators dans le milieu lillois. Du coup, c'est le Francis que se coltine les chorus et ça assure bien. Présentation en règle des titres du nouvel album à venir qui promet d'être une tuerie de plus dans leur discographie. Quelques petites hésitations sur les intros des morceaux, mais c'est normal, faut le temps que le nouveau line-up se mette en place, et dès que c'est parti, on est sur l'autoroute à forcer les péages et les barrages de flics ; ne pas s'arrêter, ne pas relâcher la pression, passer en force et s'en sortir plus vivant que jamais ("alive in a car crash"). Peuvent pas partir les Ashtones, peuvent pas lâcher la scène sans nous octroyer deux rappels saignants comme une pièce de boeuf. Ne reste plus qu'à ramasser les survivants et préparer l'arène pour les Gee Strings.

Eux aussi viennent avec un nouvel album sous le coude, et, les CDs étant toujours coincés quelque part du côté des USA, c'est la version vinyle qui est présentée ce soir. Y'a pas, une belle galette noire dans une grande pochette cartonnée, ça a quand même une autre gueule qu'un bout de plastique de 12 cm sur 12. Un jour il faudra que de savants chercheurs se penchent sur le cas Ashtones / Gee Strings, sur cette sorte de gémellité qui unit les deux groupes ; les sorties d'albums et les changements de personnels sont quasi-simultanés (chez les Gee Strings, c'est l'occasion de faire connaissance avec Steve, le nouveau batteur) et surtout cette impression qu'entre eux c'est "à la vie". Les Gee Strings aussi drainent leurs fidèles derrière eux, témoins ce groupe qui a fait le déplacement depuis Clermont-Ferrand pour voir Ingi et ses boys jouer ce soir. Sûr qu'ils n'ont pas dû regretter les kilomètres parcourus tellement l'ambiance était au rendez-vous. Passage en revue des nouveaux titres et avalanche de standards et reprises qui font mouche ("Second to None" des Avengers, "Cherry Bomb" de Joan Jett and the Black Hearts). Ingi nous offrira même une chanson en français (?) en reprenant le "Ça plane pour moi" du pseudo-punk belge Plastic Bertrand, entraînant tout le public dans une folie contagieuse. Tout le monde... sauf le fâcheux (terme poli pour "casse-burnes") de service qui tentera d'interrompre le morceaux en braillant dans le micro que "ouais c'est pas du vrai punk, et tout et tout, arrête de chanter...". Vite renvoyé dans sa zone lui, on s'en fout, on s'amuse, merde. Effectivement, "this guy is shit". En tout cas, ça faisait un putain de bien fou de revoir les Gee à Lille, d'ailleurs eux aussi étaient heureux comme tout de se retrouver là, allant même jusqu'à dédier un morceau à la mémoire de feu l'Urban Chaos, où ils mirent le feu par deux fois, et à son taulier Casquette. Y'a pas, y'a vraiment des trucs qui font chaud au coeur.