"Fuck Them All, this is Rock'n'Roll !!!" Voilà qui sonne comme un manifeste, comme une déclaration de guerre. Et pas avec n'importe quelles troupes, jugez-en : rien moins que The Flash Express, Tokyo Sex Destruction, The Saints et The BellRays. De quoi pilonner les tympans du public qui, pour un soir de semaine, s'était quand même déplacé en nombre. Et si en plus on a droit à une soirée estampillée Rock'n'Folk sans un de ces groupes d'ados parisiens (parisiannistes ?) dont la dite revue nous rebat les oreilles tous les mois, on n'allait certainement pas bouder son plaisir.

The Flash Express "from Hollywood, California" fait dans le blues survitaminé à la Blues Explosion ou à la Danko Jones. Ces trois mecs bombardent l'audience de riffs comme autant de salves d'orgues de Staline, c'est juicy et chaud. Le chanteur - qui ressemble à un William Shatner jeune - maltraite sa Telecaster à un tel point que c'est le guitariste des BellRays Tony Fate lui-même qui lui prêtera sa Gibson SG en remplacement. Le truc est tellement pêchu que dès cette ouverture de soirée on est déjà en sueur. Le seul bémol viendra d'un éclairage de scène oscillant entre le rouge boucherie ou le plein contrejour (et ceci pendant quasiment toute la soirée, mais ça semble être la mode chez les ingés lights ces temps-ci).

Les Barcelonais de Tokyo Sex Destruction, je les avais déjà vu voici un peu plus d'un an à la Cave aux Poètes de Roubaix où ils avaient foutu le feu. Leur rock est toujours aussi "garage-soul", l'énergie déployée sur scène toujours là, mais bizarrement, ça passe beaucoup moins bien sur une grande scène que dans une petite cave confinée. C'est d'ailleurs le même sentiment qu'avaient eu certains qui les ont vus cet été aux Nuits Secrètes d'Aulnoye-Aymeries. A croire que ce rock demande une proximité que ne peut pas offrir une grande scène. Si on ajoute à cela un son pourri lors de leur prestation, on reste sur sa faim avec les espagnols.

Dans la salle, on peine à reconnaître Chris Bailey, habitué qu'on était à le voir empâté par ses excès ces dernières années. Là c'est un homme aminci, en pleine forme qui apparaît devant nous (même s'il ne dédaigne pas se rafraîchir le gosier d'un coup de vin blanc entre les morceaux). Accompagné d'un batteur (le seul d'ailleurs à se retrouver sous un éclairage correct, putain de lights !) et d'un bassiste, le chanteur reste le seul survivant des Saints originels. Figure légendaire du rock australien (oubliez INXS ou Midnight Oil, pensez au rock, au vrai), l'homme, même s'il n'est pas du genre exhubérant, est visiblement heureux d'être là, et le public aussi. Du bon, du très bon pour se convertir à ces saints-là.

"Make some noise !" invite la panthère noire sur scène. Les BellRays sont là, prêt à vous choper à la gorge et ne pas vous lâcher de toute la soirée. D'emblée ça part dans le rock'n'soul qui leur est cher, de plus en plus soul, en témoigne leur dernier album. La deuxième fois que je les vois et c'est toujours autant la claque, la basse ronflante de Bob Venum alliée à la guitare cinglante de Tony Fate tissent un écrin à la voix de la diva Lisa Kekaula. C'est à fond de cinq durant tout le concert avec en plus des incursions free jazz ou orientales. La musique s'est beaucoup "sophistiquée" depuis leur passage à Tourcoing en 2004 mais l'esprit "maximum rock'n'soul" est toujours là. Je n'ai malheureusement pas pu assister à la fin de leur set pour cause de réveil programmé à cinq du mat' (il était déjà plus d'une heure du matin lorsque je quittai la salle) mais je garde l'assurance que la suite resta dans le même esprit.