Au premier abord, faire passer
Fishbone au Club de l'Aéro plutôt que sur la grande
scène pourrait s'apparenter à un manque de respect
eu égard au passé de ce groupe. Hélas, force
est de constater que, si le Club est bien rempli ce soir, dans
la grande salle, les rangs auraient été clairsemés.
Vingt ans après, la fusion des californiens ne fait hélas
plus autant recette. "The times they are a changin'"
C'est le duo bordelais The Inspector
Cluzo qui ouvre la soirée. Je dois avouer qu'avec un nom
comme ça j'avais un peu peur de tomber sur un combo reggae-ska-rocksteady
(ben ouais, les noms en "selector julbute" ou "machin-truc
inspectors" j'ai déjà donné). Point
de ça ici mais un duo guitare-batterie officiant dans un
rock-garage couillu et ces inspecteurs-là n'ont pas besoin
d'un Kato pour entrer dans la baston.
Avec Fishbone, c'est "back
to the 80's" et les débuts du funk-rock ou de la fusion
explosive. Le combo d'Angelo Moore et Norwood Fisher peut se targuer
d'avoir donné naissance à un courant qui a vu naître
les Red Hot Chili Peppers, Suicidal Tendencies ou Body Count.
Malheureusement, depuis 1979, on sent que le deuxième choc
pétrolier est passé par là et la Corvette
au V8 vrombissant qu'était Fishbone à l'époque
s'est transformé en monospace diesel avec le temps. Le
groupe met du temps à se chauffer, la montée en
régime se fait doucement au rythme de solos de sax baryton
flirtant avec le free jazz, quelques tentatives énervées
finissent dans les graviers. Il faudra attendre un bon moment
avant que le combo atteigne le régime de croisière,
et là, c'est parti ; Angelo Moore semble enfin libéré,
s'accrochant aux structures, slammant dans le public, Rocky Georges
lâche enfin ses bombes à la guitare. Enfin du lourd,
mais tardif. Frustrant, forcément frustrant.